Mission civilisatrice

La mission civilisatrice fut, durant l’expansion coloniale de l’Europe entre les XVe et XXe siècles, une théorie imaginée en France et dans d’autres pays européens qui se considéraient seuls pays civilisés ou de civilisations supérieures et qui se donnaient pour devoir — ou auraient reçu pour mission — de « civiliser » les populations non européennes, définies comme « païennes » — non chrétiennes —, et qualifiées de « sauvages » ou de « barbares » — selon une dichotomie remontant aux anciens Grecs et Romains dont ces pays européens se posaient comme les héritiers.

L’expression elle-même de « mission civilisatrice » fut couramment utilisée en France au cours des XIXe et XXe siècles[1]. Elle s’y rencontre régulièrement à partir des années 1830, y devenant un lieu commun et y étendant son champ d’application au-delà de la seule colonisation. Dans la dernière partie du siècle, la mission civilisatrice devient « le principe clé de l’impérialisme républicain Français »[2].

La même expression (civilizing mission en anglais) ou des expressions analogues se retrouvent chez les autres puissances colonisatrices de l’époque, en particulier “the white man's burden” (« le fardeau de l’homme blanc »), forgée par Rudyard Kipling. Les Britanniques se persuadaient « de leur propre particulière aptitude à répandre la civilisation »[3].

La mission civilisatrice de la France ne visait pas seulement ni prioritairement à transmettre aux indigènes non européens les fruits des progrès scientifiques et techniques de la civilisation européenne, elle visait aussi, et avant tout, à l’« assimilation » de ces indigènes par l’imposition de la langue, des institutions, des lois, des mœurs, de la « nationalité » du colonisateur dans le but de créer « La Plus Grande France »[4].

La rhétorique patriotique de la mission civilisatrice et l’abondante et diverse propagande qui l’accompagnait eut pour effet de rendre difficile pour la plupart des Français d’« imaginer que le colonialisme pouvait causer, plutôt que d’éradiquer, de dures souffrances »[5] ; et ceux qui dénonçaient ces souffrances dans leurs reportages, comme Albert Londres, Félicien Challaye ou Andrée Viollis, étaient accusés de mensonge ou d’antipatriotisme.

  1. (en) Mathew Burrows, « 'Mission civilisatrice': French Cultural Policy in the Middle East, 1860-1914 », The Historical Journal Vol. 29, No. 1,‎ (lire en ligne)
  2. “the key tenet of French republican imperialism” (Jennifer Pitts, A Turn to Empire: The Rise of Liberalism in Britain and France)
  3. “of their own particular fitness to spread civilization” (Jennifer Pitts, A Turn to Empire: The Rise of Liberalism in Britain and France)
  4. Erreur de référence : Balise <ref> incorrecte : aucun texte n’a été fourni pour les références nommées :2
  5. “The patriotic rhetoric of the imperial civilizing mission made it difficult for most Frenchmen to imagine that colonialism could cause, rather than eradicate, hardship.” (J. P. Daughton, Behind the Imperial Curtain: International Humanitarian Efforts and the Critique of French Colonialism in the Interwar Years, French Historical Studies, Vol. 34, No. 3 (2011) 

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